[?] Qu'est-ce que c'est ?
C'est une maladie auto-immune musculaire, due à un blocage de la transmission de l'influx nerveux du nerf au muscle, au niveau de la jonction du nerf avec le
muscle.
Normalement, cette transmission se fait par l'intermédiaire d'un médiateur chimique : l'acétylcholine
(A/C).
Dans la myasthénie, la transmission se fait mal car à la suite d'un dérèglement du système immunitaire, le malade fabrique des anticorps
anti-récepteurs à l’acétylcholine.
[?] Causes et facteurs de risque
La cause de cette maladie rare est inconnue mais sans doute d'origine
auto-immune. Elle peut survenir à tout âge et 2 fois sur 3 chez la femme.
On trouve dans 22% des cas une
tumeur du thymus (bénigne ou maligne) associée. L'antigène HLA-B8 est souvent associé à la forme de la jeune femme, l'antigène HLA-A3 et B7 à la forme plus tardive.
D'autres associations sont fréquentes : lupus, polyarthrite rhumatoïde, affection thyroïdienne à auto-anticorps (thyroïdite, maladie de Basedow), anémie de Biermer. Des
anticorps anti-muscles, anti-thymus sont souvent mis en évidence. Aucun facteur familial significatif n'a été retrouvé.
[?] Les signes de la maladie
Le début de la maladie est souvent insidieux.
On peut retrouver des facteurs déclenchants tels qu’une intervention
chirurgicale, une infection, un choc émotionnel, une grossesse, un surmenage.
La maladie se caractérise par une fatigabilité musculaire anormale surtout marquée après un effort ou en fin de journée. En
s'aggravant, la maladie se traduit par la survenue de paralysies à l'effort qui disparaissent au repos. Un déficit permanent incomplet peut exister dans certains muscles mais l'aggravation par
l'effort et l'amélioration par le repos sont nettes.
Certains muscles sont plus souvent touchés que d'autres :
- Les muscles oculomoteurs (diplopie : vision double) ;
- Le releveur de la paupière supérieure (chute de la paupière ou ptosis asymétrique) ;
- L'orbiculaire (fermeture des yeux) ;
- Les muscles de la face (amimie) ;
- Les masticateurs (troubles de l'alimentation et impossibilité de fermer la bouche : signe de la mâchoire pendante obligeant le patient à mettre la main sous son menton pour le soutenir) ;
- Les muscles pharyngo-laryngés (troubles de la déglutition avec dyspnée lors de fausses routes alimentaires, troubles de la phonation, voix nasonnée) ;
- Les muscles de la nuque (faiblesse du port de tête) ;
- Les muscles des racines des membres.
[?] Examens et analyses complémentaires
Le test pharmacologique consiste à injecter par voie intraveineuse
de la prostigmine (ou Tensilon) qui supprime les anomalies cliniques et électriques pendant quelques heures, confirmant le
diagnostic.
Des anticorps antirécepteurs
d'acétylcholine sont retrouvés dans le sérum, ainsi que des anticorps anti-muscles striés.
Un bilan immunologique est pratiqué à la recherche d'autres anticorps et d'une éventuelle maladie auto-immune
associée.
L'électromyogramme de stimulation-détection montre des anomalies typiques.
La tomodensitométrie thoracique recherche une tumeur du thymus.
[?] Evolution de la maladie
Elle se fait par
poussées avec rémissions plus ou moins totales, les médicaments améliorant les symptômes mais n'influençant pas le cours de la maladie.
Il y a souvent une aggravation des symptômes lors des premiers mois de la
grossesse, pendant les règles, dans les suites de couches, lors d'infections intercurrentes (grippe etc...), dans les suites d'interventions
chirurgicales avec anesthésie générale, lors d'exercices musculaires, en cas de fatigue générale, d'insomnie, de repas riches en glucides et en alcool...
Le risque majeur est
d'ordre respiratoire : troubles de la déglutition qui peuvent entraîner des fausses routes des aliments vers les bronches.
[?] Traitement
L'ablation d'une tumeur thymique lorsqu'elle existe donne
d'excellents résultats dans 50% des cas. En l'absence
de tumeur, l'exérèse du thymus semble améliorer le pronostic à long terme dans 70 à 80% des cas, aussi la plupart des auteurs la
pratiquent-ils précocement.
Le traitement médical repose principalement sur les médicaments anticholinestérasiques qui inhibent l'enzyme de dégradation de l'acétylcholine (l'acétylcholinestérase) augmentant ainsi la
quantité d'acétylcholine au niveau de la synapse neuromusculaire.
Les médicaments utilisés sont : la néostigmine ou Prostigmine , le Mestinon et
la Mytélase. Ils sont utilisés isolément ou en association, avec des doses réparties dans la journée.
Ces produits ont des effets muscariniques parfois gênants : perte d'appétit, coliques, diarrhée, hypersécrétion salivaire et bronchique, bradycardie (ralentissement du rythme
cardiaque).
La kaliémie (taux de potassium dans la
sang) doit être surveillée régulièrement.
Il faut
se méfier d'un surdosage dont l'un des signes précoces est l'apparition de fasciculations et de crampes. Les effets secondaires sont accentués : sueurs, hypersalivation, hypersécrétion
bronchique. Le surdosage peut provoquer un bloc de dépolarisation cardiaque avec des troubles respiratoires (crise myasthénique aiguë).
Certains médicaments peuvent provoquer une décompensation et sont donc contre-indiqués :
- Curare, procaïnamide, lidocaïne, morphine ;
- Quinidine, quinine ;
- Benzodiazépines, barbituriques, tranquillisants ;
- Propranolol ;
- Antibiotiques aminoglycosides (Gentamicine etc...), polymixine, colimycine ;
- Ammoniums quaternaires.
En cas de troubles respiratoires (troubles de la déglutition, toux inefficace, difficultés respiratoires) , le transfert en réanimation s'impose (trachéotomie, ventilation assistée).
D'autres traitements sont parfois prescrits :
- Le synacthène et les corticoïdes ;
- Les immunosuppresseurs (Endoxan, Imurel) ;
- Les plasmaphérèses en cas de poussée aiguë ;
- Les sels de potassium, les diurétiques d'épargne potassique (Aldactone) ;
- La contraception orale (en cas de forme à recrudescence prémenstruelle) ;
- L'irradiation du thymus en cas de thymectomie impossible.
En cas de grossesse, l'enfant peut présenter à la naissance une myasthénie sévère ou légère qui peut durer toute la vie. Le plus souvent cependant, la myasthénie néonatale ne dure que quelques semaines et disparaît spontanément.
Auteurs : :Dr Lyonel Rossant, Dr Jacqueline Rossant-Lumbroso.